Depuis plusieurs siècles, pour subvenir à ses besoins, l’Homme a érigé de nombreux ouvrages transversaux dans le lit des rivières conduisant ainsi à leur fragmentation.
Avec la pollution des eaux, l’artificialisation des sols et des berges ou encore l’augmentation des prélèvements d’eau dans un contexte de changement climatique, les obstacles à la continuité écologique constituent l’un des principaux facteurs de dégradation de la qualité générale des rivières.
Pour préserver la ressource en eau, les activités humaines ainsi que le patrimoine naturel, des actions de restauration de la continuité écologique sont menées sur le bassin de la Loire et ses affluents.
Au delà de la perturbation de la libre circulation des espèces et des sédiments (gravier, galet, sable…), la présence d’ouvrages transversaux est susceptible d’entraîner de profondes modifications de la qualité des habitats aquatiques et de la ressource en eau.
L’effet d’un ouvrage transversal (seuil fixe ou mobile, barrage, ...) varie selon ses caractéristiques, sa fonction, sa gestion et le cours d’eau sur lequel il est situé. Individuellement, l’impact peut être négligeable, mais à l’échelle de la rivière, leur cumul accentue la pression sur les milieux aquatiques.
Ainsi, les réflexions et actions doivent préférentiellement être menées à des échelles cohérentes : bassin versant, axe de migration, tronçon de rivière… et non pas uniquement sur un site.
Parmi les impacts des ouvrages,
il est le plus souvent relevé l’effet « barrière »
pour les organismes vivants et le transit sédimentaire.
Les espèces aquatiques ont besoin de se déplacer sur des distances variables pour assurer leur cycle de vie. Dans le cas des poissons grands migrateurs tels que les aloses, anguilles, lamproies
et saumons, ces déplacements se font sur plusieurs milliers
de kilomètres, entre eaux douce et salée, pour accéder aux zones
de reproduction ou de grossissement. La présence d’ouvrages peut alors occasionner des retards dans la migration ou la stopper
et ainsi compromettre la survie de ces espèces.
Concernant les sédiments, leur dépôt en amont des aménagements provoque un déficit de sable, de graviers et de cailloux
que la rivière cherche à combler sur son cours aval en érodant
son lit. Ce phénomène de creusement peut alors entraîner
un abaissement de la nappe alluviale ou encore des dégâts
sur les ouvrages d’art, comme les ponts.
Avec l’uniformisation et le ralentissement des cours d’eau en amont des ouvrages, le blocage des sédiments entraîne la raréfaction
des zones de reproduction (frayères) de certaines espèces
notamment les plus sensibles comme le saumon, la truite
et les autres poissons migrateurs.
Plusieurs dizaines de milliers d’ouvrages sont recensés sur le bassin de la Loire et ses affluents.
Leur répartition n’est pas homogène sur le territoire.
Si aujourd’hui peu d’obstacles jalonnent le fleuve,
la situation est différente sur la plupart
de ses principaux affluents. Elle est aggravée,
pour certains d’entre eux, par la présence
de nombreux ouvrages difficilement franchissables.
D’importants obstacles ont déjà été aménagés
ou supprimés tels que Maisons-Rouges sur la Vienne,
Blois sur la Loire, Vichy sur l’Allier ou encore
Rochepinard sur le Cher.
Un travail conséquent reste à mener pour nombre d’autres, notamment sur les cours d’eau à forts enjeux concernés par des obligations réglementaires
de restauration de la continuité.
Sur la base d’analyses techniques et économiques,
le choix de la solution de restauration de la continuité revient aux propriétaires ou gestionnaires de l’ouvrage.
La suppression totale ou partielle de l’obstacle
est le moyen le plus efficace. Il permet également d’améliorer l’état global du cours d’eau.
Lorsque cette solution n’est pas retenue,
des alternatives existent.
L’une consiste à gérer l’ouverture des parties mobiles de l’ouvrage (vannes, clapets…) aux périodes
les plus favorables à la circulation des poissons
et des sédiments.
Des aménagements tels que la création de passes
à poissons, rivières de contournement…
constituent des solutions pour le franchissement piscicole sous réserve de leur bon dimensionnement
et de leur entretien régulier. Ces équipements peuvent être complétés par des mesures de gestion pour assurer
le transit sédimentaire.
À la demande de ses collectivités membres et partenaires, l’Établissement public Loire mène, depuis près de 30 ans, différents types d’actions en faveur de la restauration de la continuité écologique.
À titre d’exemple, au cours de
ces dernières années, des solutions
ont été trouvées pour 55 ouvrages situés sur des axes du bassin
de la Loire et ses affluents. À terme, elles devraient permettre ainsi d’améliorer la situation sur plus de 250 kilomètres de rivières
à poissons migrateurs.
Par ailleurs, en tant que propriétaire d’ouvrages, l’Établissement a réalisé
en Haute-Loire l’effacement du barrage du Fatou devenu vétuste et construit en Lozère deux passes à poissons sur les seuils de l’Allier et du Chapeauroux associés au barrage de Naussac.
Dans le cadre des démarches portées par l’Établissement public Loire notamment sur le Loir, la Sarthe et la Mayenne dans le Maine-et-Loire, a été favorisée la concertation avec les propriétaires, les représentants des collectivités, des usagers ainsi que les établissements publics
et services de l’État (Agence de l’eau, Agence Française pour la biodiversité, Directions Régionales de l’Environnement, des Affaires Culturelles,…).
Concernant la démarche sur le Cher, cette concertation a été renforcée en portant les discussions au sein des instances du Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux Cher aval. Ainsi, un programme d’actions, basé essentiellement sur la gestion des barrages mobiles et la réalisation ponctuelle d’aménagements, a pu être défini tout en respectant le consensus établi dans le projet de développement de la vallée du Cher porté par les Départements d’Indre-et-Loire et de Loir-et-Cher.
Pour évaluer les effets d’opérations de restauration
de la continuité écologique, des investigations avant, pendant et après doivent être menées. Différents critères peuvent être pris en considération tels que la qualité
de l’eau, des habitats, de la faune et de la flore.
Pour les espèces piscicoles, il est possible de qualifier
et quantifier les peuplements à partir d’observations
au droit de stations de comptage et de pêches électriques. Le marquage de poissons à l’aide d’émetteurs peut également permettre de suivre leur migration et d’identifier des obstacles les plus pénalisants.
Pour les cours d’eau, le suivi de leur évolution se fait
au travers d’observations de terrain : relevés topographiques, analyse de la nature et la quantité
de sédiments, la présence de zones d’érosion des berges...).
Pour apprécier les enjeux et mutualiser les moyens,
ces connaissances doivent être partagées à large échelle
dans des bases de données comme celle des Obstacles
à l’Écoulement gérée par l’Agence française
pour la biodiversité.