GESTION DE L'EAU ET DES RISQUES ASSOCIES : QUEL APPORT DES SCIENCES COMPORTEMENTALES ?
Constatant l’effet limité des contraintes dans la modification des comportements liés à la gestion de l’eau et des risques associés, l’Etablissement public Loire a engagé dans la fin des années 2000 une réflexion sur l’intérêt d’utiliser les incitations dans ses domaines d’intervention. Cela a conduit au lancement en 2007 d’une démarche de réduction de la vulnérabilité aux inondations des activités économiques du bassin, approche expérimentale et innovante pour amener les entreprises à s’engager sur une base volontaire dans la réduction de leurs vulnérabilités (forte sensibilisation, gratuité du diagnostic, facilitation de la mise en place de mesures, etc.). Les résultats se sont révélés probants et ont encouragé l’Etablissement à approfondir sa réflexion sur le recours aux incitations.
C’est ainsi que, dès 2014, il s’est engagé dans une démarche exploratoire visant à évaluer l’intérêt d’utiliser les sciences comportementales pour améliorer ses interventions, dans un objectif de plus grande efficience de l’action publique. Dans la palette des méthodes et outils nouveaux qu’offrent ces disciplines, un outil a été plus spécifiquement exploré : le nudge (« coup de pouce » en anglais), un levier ni règlementaire, ni économique, qui favorise le changement de comportement, à faible coût pour le décideur public. Dans ce contexte, il peut être fait mention de la constitution d’une base de données, à partir d’une vaste revue de littérature scientifique et technique, référençant plus de 130 nudges et ayant vocation à servir de « boîte à outils » pour la construction d’incitations.
Un dépliant de vulgarisation, diffusé en amont de DiSCo’Loire 2016, fournit des éléments à la fois théoriques et pratiques pour comprendre ce qu’est un nudge et l’intérêt qu’il peut avoir dans l’élaboration de politiques publiques plus efficientes. Des exemples d’applications et des témoignages de chercheurs et praticiens apportent une illustration complémentaire. Il constitue un support visant à montrer les applications potentielles des sciences comportementales dans les politiques de gestion de l’eau et des risques associés.
DISCO’LOIRE 2016
Dans un contexte où la gestion de l’eau et des risques associés nécessite des solutions innovantes et complémentaires aux réponses techniques, l’Etablissement public Loire vient d’organiser la 1ère édition des Dialogues sur les Sciences Comportementales et la gestion d’un bassin fluvial.
Jalonnée de présentations de chercheurs et praticiens des sciences comportementales appliquées aux politiques publiques, cette rencontre collaborative avait pour objectif de faire émerger des réponses nouvelles aux problématiques qui touchent les gestionnaires de bassin, telles que la prévention du risque inondation ou l’adaptation au changement climatique. La finalité sous-jacente étant la « mise en mouvement », dans ce domaine, d’acteurs publics ayant en partage leur intérêt pour la Loire et ses affluents.
Cette journée de réflexion a permis l’intervention d’une dizaine d’experts des sciences comportementales en France et en Europe. Parmi eux, la présence d’organisations internationales et d’administrations nationales telles que l’OCDE, la Commission Européenne, le Secrétariat Général pour la Modernisation de l’Action Publique, ou encore l’équipe pionnière de la « Nudge Unit » britannique, démontre à la fois l’engouement institutionnel pour le potentiel sous-exploité des sciences comportementales, tout comme la nécessité d’ajouter rapidement et systématiquement ces disciplines dans la boîte à outils de l’action publique, en particulier lorsqu’il s’agit de domaines prioritaires comme la gestion de l’eau et des risques associés. De même, l’intervention de chercheurs de laboratoires spécialisés français et européens était indispensable pour fonder les échanges sur des bases théoriques robustes et fiables, démontrant par la même occasion la vitalité de la recherche européenne dans ces disciplines.
La grande qualité des interventions, élaborées dans un souci de vulgarisation et d’accessibilité au public invité – composé principalement de gestionnaires de bassins fluviaux, a permis de susciter des échanges et de poser les premières bases d’une réflexion plus territorialisée de l’application des sciences comportementales. Mais surtout, cette journée a favorisé l’émergence de pistes d’applications concrètes des sciences comportementales dans les domaines de la gestion de l’eau et des risques associés. Ainsi, des projets de travail sont d’ores-et-déjà envisagés, à la confluence de la recherche académique et de l’administration publique.